iii. François (élu en 2013)
Elu le 13 mars 2013, François reçoit le 22 mars le Corps diplomatique et, à cette occasion, poursuit la réflexion entamée par son prédécesseur sur un danger « qui laisse chacun comme mesure de lui-même, et met en péril la convivialité entre les hommes » : la « dictature du relativisme ». Il explique, comme Benoît XVI l’avait fait : « il n’y a pas de véritable paix sans vérité ! La paix ne peut pas être véritable si chacun est la mesure de lui-même, si chacun peut revendiquer toujours et seulement son droit personnel, sans avoir le souci en même temps du bien des autres, de tous, à partir de la nature qui unit chaque être humain sur cette terre. » Il faut donc « jeter des ponts entre tous les hommes, si bien que chacun puisse trouver dans l’autre, non un ennemi, non un concurrent, mais un frère à accueillir et à embrasser ! » Toutefois, « le rôle de la religion est fondamental. On ne peut pas en effet construire des ponts entre les hommes en oubliant Dieu. Mais le contraire vaut aussi : on ne peut vivre des liens véritables avec Dieu en ignorant les autres. »[1]
d’emblée, le pape est confronté à la guerre en Syrie. Il prend position et agit.
Le 1er septembre 2013, le pape François lance un appel vibrant et pathétique à la paix lors de l’Angélus, Place Saint-Pierre. Il propose que le 7 septembre, veille de la fête de la naissance de la Vierge Marie, soit pour l’Église une journée de jeûne et de prière pour la paix en Syrie, au Proche-Orient et dans le monde. Il invite les autres confessions chrétiennes à se joindre à cette journée et les autres religions à s’y unir par des initiatives de leur choix.
« Chers frères et sœurs, je voudrais me faire aujourd’hui l’interprète du cri qui monte de toutes les parties de la terre, de tous les peuples, du cœur de chacun, de l’unique grande famille qu’est l’humanité, avec une angoisse croissante : c’est le cri de la paix ! Et le cri qui dit avec force : nous voulons un monde de paix, nous voulons être des hommes et des femmes de paix, nous voulons que dans notre société déchirée par les divisions et les conflits, explose la paix ; plus jamais la guerre ! Plus jamais la guerre ! La paix est un don éminemment précieux, qui doit être promu et préservé.
Je vis avec une particulière souffrance et préoccupation les nombreuses situations de conflit qu’il y a sur notre terre, mais, ces jours-ci, mon cœur est profondément blessé par ce qui se passe en Syrie et angoissé par les développements dramatiques qui s’annoncent.
J’adresse un appel fort pour la paix, un appel qui naît du plus profond de moi-même ! Que de souffrance, que de destruction, que de douleur a provoqué et provoque l’usage des armes dans ce pays affligé, particulièrement parmi les populations civiles et sans défense ! Pensons : Que d’enfants ne pourront pas voir la lumière de l’avenir ! Avec une fermeté particulière je condamne l’usage des armes chimiques ! Je vous dis que j’ai encore, fixées dans mon esprit et dans mon cœur, les terribles images de ces derniers jours ! Sur nos actions il y a un jugement de Dieu et aussi un jugement de l’histoire, auxquels on ne peut pas échapper ! Ce n’est jamais l’usage de la violence qui conduit à la paix. La guerre appelle la guerre, la violence appelle la violence !
De toutes mes forces, je demande aux parties en conflit d’écouter la voix de leur conscience, de ne pas s’enfermer dans leurs propres intérêts, mais de regarder l’autre comme un frère et d’entreprendre courageusement et résolument le chemin de la rencontre et de la négociation, en dépassant les oppositions aveugles. Avec la même fermeté, j’exhorte aussi la communauté internationale à fournir tout effort pour promouvoir, sans délai ultérieur, des initiatives claires fondées sur le dialogue et la négociation pour la paix dans cette Nation, pour le bien de tout le peuple syrien.
qu’aucun effort ne soit épargné pour garantir une assistance humanitaire à ceux qui sont touchés par ce terrible conflit, particulièrement aux réfugiés dans ce pays et aux nombreux réfugiés dans les pays voisins. Que soit garantie aux agents humanitaires engagés à alléger les souffrances de la population, la possibilité d’apporter l’aide nécessaire.
Que pouvons-nous faire pour la paix dans le monde ? Comme le disait le pape Jean XXIII : À tous incombe la tâche de rétablir les rapports de la vie en société sur les bases de la justice et de l’amour (cf. Pacem in terris,11 avril 1963).
qu’une chaîne d’engagement pour la paix unisse tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté ! C’est une forte et pressante invitation que j’adresse à toute l’Église catholique, mais que j’étends à tous les chrétiens d’autres confessions, aux hommes et aux femmes de chaque religion, ainsi qu’à ces frères et sœurs qui ne croient pas : la paix est un bien qui dépasse toute barrière, parce qu’elle est un bien de toute l’humanité.
Je le répète à haute voix, ce n’est pas la culture de l’affrontement, la culture du conflit qui construit la vie collective dans un peuple et entre les peuples, mais celle-ci : la culture de la rencontre, la culture du dialogue. C’est l’unique voie pour la paix.
Que le cri de la paix s’élève pour arriver au cœur de tous et que tous déposent les armes et se laissent guider par le souffle de la paix.
À Marie, nous demandons de nous aider à répondre à la violence, au conflit et à la guerre, par la force du dialogue, de la réconciliation et de l’amour. Elle est mère : qu’elle nous aide à retrouver la paix ; nous sommes tous ses enfants ! Aide-nous, Marie, à dépasser ce moment difficile et à nous engager à construire chaque jour et dans tous les domaines une culture authentique de la rencontre et de la paix. Marie, Reine de la paix, prie pour nous ! »[2]
Le 4 septembre, François lance un appel aux dirigeants du G20[3] dont les ministres, les chefs des banques centrales et les chefs d’États se réunissent régulièrement. Il a été créé en 1999, après la succession des crises financières des années 90[\]. Il vise à favoriser la concertation internationale entre pays importants au point de vue économique.] qui vont se réunir à Saint-Pétersbourg les 5 et 6 septembre. Pour cela, il écrit à Vladimir Poutine, la Russie assurant la présidence de cette réunion. Dans un premier temps, François rappelle la nécessité d’une éthique économique, financière et sociale internationale qui permette à « tous les êtres humains de mener une vie digne, du plus âgé d’entre eux à l’enfant qui n’est pas encore né », à tout être humain et pas seulement aux citoyens des pays membres du G20. Bien que l’objectif de ce groupe ne soit pas de s’occuper des conflits armés à travers le monde, le pape fait remarquer qu’il est vain de parler de développement économique[4] si la paix ne règne pas. Il demande donc qu’on n’oublie pas « la situation du Moyen-Orient, et en particulier celle de la Syrie. Il est regrettable que, depuis le tout début du conflit syrien, des intérêts partisans ont prévalu et entravé la recherche d’une solution qui aurait évité le massacre insensé qui se déroule maintenant »[5]. Il souligne que ce conflit qui a trop duré « risque même de causer de plus grandes souffrances à une région amèrement éprouvée par les conflits, qui aspire à la paix. » Il faut donc que les dirigeants de ces puissances trouvent « les moyens de surmonter les positions divergentes ; qu’ils renoncent à la vaine prétention d’une solution militaire ; qu’il y ait plutôt un engagement renouvelé à chercher, avec courage et détermination, une solution pacifique à travers le dialogue et la négociation entre les parties impliquées, qui soit soutenue unanimement par la communauté internationale. De plus, tous les gouvernements ont le devoir moral de faire tout ce qui est possible pour apporter une assistance humanitaire à ceux qui souffrent du conflit, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières du pays. »[6]
Le 7 septembre, le pape préside place Saint-Pierre, la veillée de prière[7] alors que les États-Unis et la France ont annoncé leur intention de frapper militairement la Syrie après que des armes chimiques y ont été utilisées contre la population civile.
Partant du regard de Dieu sur sa création au début du livre de la Genèse (« Dieu vit que cela était bon »), François se demande ce que ce « message » signifie pour nous :
« Il nous dit simplement que, dans le cœur et dans la pensée de Dieu, notre monde est la maison de l’harmonie et de la paix, le lieu où tous peuvent trouver leur place et se sentir chez soi, parce que cela est « bon ». Tout le créé forme un ensemble harmonieux, bon ; mais surtout les humains, faits à l’image et à la ressemblance de Dieu, sont une unique famille, dans laquelle les relations sont marquées par une fraternité non seulement proclamée en paroles mais réelle : l’autre est le frère, la sœur à aimer, et la relation avec Dieu qui est amour, fidélité, bonté se reflète sur toutes les relations entre les êtres humains et apporte l’harmonie à la création tout entière. Le monde de Dieu est un monde dans lequel chacun se sent responsable de l’autre, du bien de l’autre. Ce soir, dans la réflexion, dans le jeûne, dans la prière, nous pensons au fond de nous-mêmes, en chacun de nous : n’est-ce pas ce monde-là que je désire ? N’est-ce pas ce monde-là que nous portons tous dans le cœur ? Le monde que nous voulons, n’est-il pas un monde d’harmonie et de paix, en nous-mêmes, dans les rapports avec les autres, dans les familles, dans les villes, dans et entre les nations ? Et la vraie liberté dans le choix des chemins à parcourir en ce monde, n’est-ce pas celle qui est orientée vers le bien de tous et guidée par l’amour ? » Tel est donc, « le monde de Dieu », le monde tel que Dieu le crée, le conçoit, le veut.
Si le monde conserve de sa beauté initiale, il y a aussi « la violence, la division, le conflit, la guerre ». La source de ce désordre est l’égoïsme, la volonté de pouvoir, l’oubli de la fraternité lorsque nous sommes comme Caïn (Gn 4, 9) et que nous avons endormi notre conscience.
Comment arriver à la paix ? Avec l’aide de Dieu, c’est possible et il faut le vouloir à la manière de Dieu qui, sur la croix, « ne répond pas à la violence par la violence » mais parle « le langage de la réconciliation, du pardon, du dialogue, de la paix »[8].
Et devant 300 personnalités représentant les grandes religions et la société civile, « laïcs et humanistes », qui participaient, du 27 au 30 septembre 2013, à la 27e rencontre pour la paix, organisée par la Communauté de Sant’Egidio, François, après avoir rappelé qu’« il ne peut y avoir aucune justification religieuse à la violence », appelaient ses interlocuteurs à la persévérance car, disait-il, « nous ne pouvons jamais nous résigner devant la souffrance de peuples entiers, otages de la guerre, de la misère, de l’exploitation. Nous ne pouvons pas assister dans l’indifférence et l’impuissance au drame des enfants, des familles, des personnes âgées, frappés par la violence. Nous ne pouvons pas laisser le terrorisme prendre en otage le cœur de quelques violents pour provoquer la souffrance et la mort d’un grand nombre ». Et il insistait sur la prière et le dialogue : « En tant que responsables des différentes religions nous pouvons beaucoup faire. La paix est la responsabilité de tous. Prier pour la paix, travailler pour la paix ! Un leader religieux est toujours un homme ou une femme de paix, car le commandement de la paix est gravé au plus profond des traditions religieuses que nous représentons. Mais que pouvons-nous faire ? Vos rencontres chaque année, nous suggèrent le chemin : le courage du dialogue. Ce courage, ce dialogue nous donnent l’espérance. Rien à voir avec l’optimisme, c’est autre chose. Espérance ! Dans le monde, dans la société, il y a peu de paix car le dialogue fait défaut, on a du mal à sortir de l’horizon de nos propres intérêts pour nous ouvrir à un vrai et franc parler. Pour la paix il faut un dialogue tenace, patient, fort, intelligent, pour lequel rien n’est perdu. Le dialogue peut vaincre la guerre. Le dialogue fait vivre ensemble des personnes de différentes générations, qui souvent s’ignorent ; il fait vivre ensemble des citoyens de différentes origines ethniques, de différentes convictions. Le dialogue est le chemin de la paix. Parce que le dialogue favorise l’entente, l’harmonie, la concorde, la paix. C’est pourquoi il est vital que le dialogue croisse, qu’il se répande au milieu des hommes de toutes les conditions et convictions comme une trame de paix qui protège le monde et surtout protège les plus faibles. Les leaders religieux sont appelés à être de vrais hommes de dialogue, à œuvrer pour la construction de la paix non pas comme des intermédiaires, mais comme d’authentiques médiateurs. Les intermédiaires cherchent à rallier à eux toutes les parties, afin d’en obtenir un profit. Le médiateur, par contre, est celui qui ne garde rien pour lui, mais se dépense généreusement jusqu’à l’épuisement, sachant que le seul bénéfice est celui de la paix. Chacun d’entre nous est appelé à être un artisan de la paix, en unissant et non pas en divisant, en supprimant la haine et non pas en la conservant, en ouvrant les voies du dialogue et non pas en érigeant de nouveaux murs ! Dialoguer, nous rencontrer pour instaurer dans le monde la culture du dialogue, la culture de la rencontre. L’héritage de la première rencontre d’Assise, que vous avez alimenté aussi d’année en année par votre cheminement, montre que le dialogue est intimement lié à la prière de chacun. Dialogue et prière grandissent ou dépérissent ensemble. La relation de l’homme avec Dieu est l’école et l’aliment du dialogue avec les hommes. Le pape Paul VI parlait « d’origine transcendante du dialogue » et disait : « La religion est de sa nature un rapport entre Dieu et l’homme. La prière exprime en dialogue ce rapport » (Encyclique Ecclesiam suam, 72). Continuons à prier pour la paix dans le monde, pour la paix en Syrie, pour la paix au Moyen-Orient, pour la paix dans beaucoup de pays du monde. Que ce courage de paix donne le courage de l’espérance au monde, à tous ceux qui souffrent à cause de la guerre, aux jeunes soucieux de leur avenir. Que Dieu Tout-puissant, qui écoute nos prières, nous soutienne dans notre cheminement de paix. »[9]
L’année 2013 fut aussi l’occasion de célébrer les 50 ans de l’encyclique Pacem in terris. François rappelle « le fondement de la construction de la paix » : « l’origine divine de l’homme, de la société et de l’autorité elle-même, qui engage les personnes, les familles, les divers groupes sociaux et les États à vivre des relations de justice et de solidarité ». Cette origine oblige les hommes à « construire la paix, à l’exemple de Jésus-Christ, en parcourant ces deux voies : promouvoir et pratiquer la justice, avec vérité et amour ; contribuer, chacun selon ses possibilités, au développement humain intégral, selon la logique de la solidarité ». Et donc, « il ne peut y avoir de véritable paix et harmonie si nous ne travaillons pas en vue d’une société plus juste et solidaire, si nous ne dépassons pas les égoïsmes, les individualismes, les intérêts de groupe et cela à tous les niveaux. » Partout et toujours, « il faut promouvoir, respecter et protéger » « la valeur de la personne, la dignité de tout être humain […]. Et pas seulement les principaux droits civils et politiques qui doivent être garantis […] mais il faut aussi offrir à chacun la possibilité d’accéder effectivement aux moyens essentiels de subsistance, la nourriture, l’eau, le logement, les soins médicaux, l’instruction et la possibilité de former et de faire vivre une famille.[10] Tels sont les objectifs qui ont une priorité indérogeable dans l’action nationale et internationale et en mesurent la valeur. De ceux-ci dépend la paix durable pour tous. Et il est important également de laisser un espace à la riche gamme d’associations et d’organismes intermédiaires qui, dans la logique de la subsidiarité et dans l’esprit de la solidarité, poursuivent ces objectifs. »
Tous ces principes ne semblent pas trouver d’écho dans nos sociétés. Certes, « ce n’est pas le dogme qui indique les solutions pratiques, mais plutôt le dialogue, l’écoute, la patience, le respect de l’autre, la sincérité et également la disponibilité à revoir sa propre opinion. Au fond, l’appel à la paix de Jean XXIII en 1962 visait à orienter le débat international selon ces vertus ».
Les principes fondamentaux que proclame Pacem in terris peuvent guider toute réflexion sur les problèmes du temps : « l’urgence éducative, l’influence des moyens de communication de masse sur les consciences, l’accès aux ressources de la terre, le bon ou mauvais usage des résultats des recherches biologiques, la course aux armements et les mesures de sécurité nationales et internationales. La crise économique mondiale, qui est un symptôme grave du manque de respect pour l’homme et pour la vérité avec laquelle ont été prises des décisions de la part des gouvernements et des citoyens, nous le dit clairement. Pacem in terris trace une ligne qui va de la paix à construire dans le cœur des hommes à une révision de notre modèle de développement et d’action, à tous les niveaux, afin que notre monde soit un monde de paix. »[11]
Le 4 octobre, à Assise, le Pape François, analysant la personnalité de saint François, relève que « celui qui suit le Christ reçoit la véritable paix, celle que lui seul, et non pas le monde, peut nous donner. Beaucoup associent saint François à la paix, et c’est juste, mais peu vont en profondeur. Quelle est la paix que François a accueillie et vécue et qu’il nous transmet ? Celle du Christ, passée par le plus grand amour, celui de la croix. C’est la paix que Jésus ressuscité donna aux disciples quand il apparut au milieu d’eux (cf. Jn 20, 19.20). » Et il ajoute : « La paix franciscaine n’est pas un sentiment doucereux. S’il vous plaît : ce saint François n’existe pas ! Elle n’est pas non plus une espèce d’harmonie panthéiste avec les énergies du cosmos… cela aussi n’est pas franciscain ! Cela aussi n’est pas franciscain, mais c’est une idée que certains ont construite ! La paix de saint François est celle du Christ, et la trouve celui qui « prend sur soi » son « joug », c’est-à-dire son commandement : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés (cf. Jn 13, 34 ; 15, 12). Et on ne peut pas porter ce joug avec arrogance, avec présomption, avec orgueil, mais on peut le porter seulement avec douceur et humilité du cœur », pour être des « instruments de paix ». L’amour triomphe du mal comme nous le montre Jésus en croix et l’amour implique le respect pour la création comme pour tout homme qui est au centre de la création et non « un instrument des idoles que nous créons ».[12]
Il n’y a pas que les grands conflits armés qui attirent l’attention du pape, il y a d’autres formes de violence destructrices. Recevant une délégation du Centre « Simon Wiesenthal », organisation juive internationale pour la défense des droits de l’homme, le pape déclare que « le problème de l’intolérance doit être affronté sous toutes ses formes : partout où une minorité est persécutée et marginalisée en raison de ses convictions religieuses ou de son identité ethnique, le bien-être de la société dans son ensemble est menacé ».Pensant aussi « aux souffrances, à la marginalisation et aux véritables persécutions que bien plus qu’une poignée de chrétiens subissent dans différents pays », il invite à « lutter contre toute forme de racisme, d’intolérance et d’antisémitisme » et « à promouvoir une culture de rencontre, de respect, de compréhension et de pardon mutuel » par l’éducation et l’engagement. L’éducation transmet des faits et offre un témoignage vivant de génération en génération. Mais il s’agit aussi de « transmettre aux jeunes l’importance de travailler ensemble pour abattre les murs et construire des ponts entre nos cultures et nos traditions religieuses », leur « transmettre une passion pour rencontrer et connaître les autres, pour promouvoir une participation active et responsable de nos jeunes » et de s’engager « au service de la société et des personnes qui sont le plus dans le besoin acquiert une valeur particulière.[13]
Toute la préoccupation de l’Église apparaît à l’occasion de la guerre en Syrie : faire taire les armes, « trouver une solution dans le dialogue, pour parvenir à une réconciliation en profondeur entre les parties », « construire un avenir de paix pour la Syrie dans laquelle tous puissent vivre librement et s’exprimer dans leur particularité », que la communauté internationale poursuive son action dans ce sens, assurer une assistance humanitaire en Syrie et dans les pays qui accueillent les réfugiés, « au-delà des appartenances ethniques et religieuses » avec l’aide des chrétiens autochtones.[14]
Très attaché au problème de la pauvreté, François souligne, comme ses prédécesseurs, le lien entre l’injustice sociale et la violence : « tant que ne s’éliminent pas l’exclusion sociale et la disparité sociale, dans la société et entre les divers peuples, il sera impossible d’éradiquer la violence. On accuse les pauvres et les populations les plus pauvres de la violence, mais, sans égalité de chances, les différentes formes d’agression et de guerre trouveront un terrain fertile qui tôt au tard provoquera l’explosion. Quand la société -locale, nationale ou mondiale- abandonne dans la périphérie une partie d’elle-même, il n’y a ni programmes politiques, ni forces de l’ordre ou d’intelligence qui puissent assurer sans fin la tranquillité. Cela n’arrive pas seulement parce que la disparité sociale provoque la réaction violente de ceux qui sont exclus du système, mais parce que le système social et économique est injuste à sa racine. De même que le bien tend à se communiquer, de même le mal auquel on consent, c’est-à-dire l’injustice, tend à répandre sa force nuisible et à démolir silencieusement les bases de tout système politique et social, quelle que soit sa solidité. Si toute action a des conséquences, un mal niché dans les structures d’une société comporte toujours un potentiel de dissolution et de mort. C’est le mal cristallisé dans les structures sociales injustes, dont on ne peut pas attendre un avenir meilleur. »[15] En définitive, « une paix qui n’est pas le fruit du développement intégral de tous n’aura pas d’avenir et sera toujours semence de nouveaux conflits et de diverses formes de violence. »[16]