⁢vii. La puissance de Dieu dans la faiblesse des hommes.

La puissance de Dieu est force et pouvoir, il est « le puissant de Jacob », le « rocher », la « citadelle », le « bouclier d’Israël » qui « déploie la force de son bras » ou « de sa droite » en faveur de son peuple. Puissance créatrice dont dérivent toutes les autres puissances humaines vouées à achever la création : Dieu donne à l’homme un jardin pour qu’il le cultive et domine sur les animaux. Et le pouvoir politique tout provisoire, relatif et imparfait⁠[1] qu’il soit, fondé sur la force et même la violence, vient aussi de Dieu et a son rôle à jouer sachant qu’il est limité et voué à préparer les voies du Seigneur.⁠[2]

La puissance de Dieu réside en sa parole créatrice et efficace, une parole qui convainc et entraîne par la bouche des prophètes⁠[3]. Et la parole essentielle de l’Ancien testament est la parole du Sinaï, la Loi, la Torah, les cinq livres du Pentateuque qui fondent le peuple de Dieu. Peuple des « pauvres de Yahweh », peuple de ceux qui écoutent humblement le message et non le peuple d’l’Israël orgueilleux et sourd.⁠[4] Peuple patient qui souffrira la persécution à l’instar de ses prophètes, de Moïse, d’Elie, Zacharie ou encore Jérémie mais toutes ces souffrances seront salvatrices car la puissance de Dieu s’y manifestera⁠[5] dans la mesure où, dans la faiblesse la plus extrême, le serviteur gardera sa confiance en Dieu et s’abandonnera à sa puissance. Telle est la puissance paradoxale de Dieu.⁠[6] Et le peuple médiateur de la paix sera l’humble peuple de Dieu : « il ne fera pas la guerre pour obtenir la paix. Il aura la puissance de Dieu. »[7]


1. A l’image de Nabuchodonosor, le pouvoir politique a tendance à se donner un caractère religieux empiétant sur l’autorité de Dieu. (Cf. Dn 3).
2. Cf. Rm 13, 1-7 : « Que tout homme soit soumis aux autorités qui exercent le pouvoir, car il n’y a d’autorité que par Dieu et celles qui existent sont établies par lui. Ainsi celui qui s’oppose à l’autorité se rebelle contre l’ordre voulu par Dieu, et les rebelles attireront la condamnation sur eux-mêmes. En effet, les magistrats ne sont pas à craindre quand on fait le bien, mais quand on fait le mal. Veux-tu ne pas avoir à craindre l’autorité ? Fais le bien et tu recevras ses éloges, car elle est au service de Dieu pour t’inciter au bien. Mais si tu fais le mal, alors crains. Car ce n’est pas en vain qu’elle porte le glaive : en punissant, elle est au service de Dieu pour manifester sa colère envers le malfaiteur. C’est pourquoi il est nécessaire de se soumettre, non seulement par crainte de la colère, mais encore par motif de conscience. C’est encore la raison pour laquelle vous payez des impôts : ceux qui les perçoivent sont chargés par Dieu de s’appliquer à cet office. Rendez - chacun ce qui lui est dû : l’impôt, les taxes, la crainte, le respect, à chacun ce que vous lui devez. » Si le pouvoir politique était intrinsèquement mauvais, le psalmiste ne nous dessinerait pas le portrait du roi idéal (cf. Ps 2 ; 20 ; 21 ; 45 ; 72 ; 101 ; 110 et 144 et notamment Ps 45, 2, 7 ; 72, 3,4,7,16).
3. Cf. Jr 1, 4-10 : « La parole du Seigneur s’adressa à moi : « Avant de te façonner dans le sein de ta mère, je te connaissais ; avant que tu ne sortes de son ventre, je t’ai consacré ; je fais de toi un prophète pour les nations. » Je dis : « Ah ! Seigneur Dieu, je ne saurais parler, je suis trop jeune. » Le Seigneur me dit : « Ne dis pas : je suis trop jeune. Partout où je t’envoie, tu y vas ; tout ce que je te commande, tu le dis ; n’aie peur de personne : je suis avec toi pour te libérer -oracle du Seigneur. » Le Seigneur, avançant la main, toucha ma bouche, et le Seigneur me dit : « Ainsi je mets mes paroles dans ta bouche. Sache que je te donne aujourd’hui autorité sur les nations et sur les royaumes, pour déraciner et renverser, pour ruiner et démolir, pour bâtir et planter. » » Isaïe dira : « Il a disposé ma bouche comme une épée pointue, dans l’ombre de sa main il m’a dissimulé. Il m’a disposé comme une flèche acérée, dans son carquois il m’a tenu caché. » (Is 49, 2). Et Dieu dit par le prophète : « C’est que, comme descend la pluie ou la neige, du haut des cieux, et comme elle ne retourne pas là-haut sans avoir saturé la terre, sans l’avoir fait enfanter et bourgeonner, sans avoir donné semence au semeur et nourriture à celui qui mange, ainsi se comporte ma parole du moment qu’elle sort de ma bouche : elle ne retourne pas vers moi sans résultat , sans avoir exécuté ce qui me plaît et fait aboutir ce pour quoi je l’avais envoyée. » (Is 55, 10-11).
4. Comme l’annonce le Seigneur par la bouche de Sophronie : « En ce jour-là, tu n’auras plus à rougir de toutes tes mauvaises actions, de ta révolte contre moi ; car à ce moment-là, j’aurai enlevé du milieu de toi tes vantards orgueilleux, et tu cesseras de faire l’arrogante sur ma montagne sainte. Je maintiendrai au milieu de toi un reste de gens humbles et pauvres ; et ils chercheront refuge dans le nom du Seigneur. Le reste d’Israël ne commettra plus d’iniquité ; ils ne diront plus de mensonges, on ne surprendra plus dans leur bouche de langage trompeur ; mais ils pourront paître et se reposeront sans personne pour les faire trembler. » (So 3, 11-13).
5. Cf. Is 53, 11-12, à propos du serviteur souffrant : « Ayant payé de sa personne, il verra une descendance, il sera comblé de jours ; sitôt connu, juste, il dispensera la justice, lui, mon Serviteur, au profit des foules, et c’est avec des myriades qu’il constituera sa part de butin, puisqu’il s’est dépouillé lui-même jusqu’à la mort et qu’avec les pécheurs, il s’est laissé recenser, puisqu’il a porté, lui, les fautes des foules et que, pour les pécheurs, il vient s’interposer. »
6. Cf. Za 9, 9-10 : « Tressaille d’allégresse, fille de Sion ! Pousse des acclamations, fille de Jérusalem ! Voici que ton roi s’avance vers toi ; il est juste et victorieux, humble, monté sur un âne - sur un ânon tout jeune. Il supprimera d’Ephraïm le char de guerre et de Jérusalem, le char de combat. Il brisera l’arc de guerre et il proclamera la paix pour les nations. Sa domination s’étendra d’une mer à l’autre et du Fleuve jusqu’aux extrémités du pays. »
7. COMBLIN J., op. cit., p. 176.