⁢vi. qu’en pense Jean-Paul II ?

Dans son Discours de réception[1], le 24-10-1998, Jean Guéguinou, ambassadeur de France près le Saint-Siège, assura le Souverain Pontife qu’en France régnait « une conception apaisée de la laïcité, (…) une vision des relations des relations entre l’Église et l’État qui préserve un espace de vie fraternelle entre les hommes, quelles que soient leurs croyances »

Dans sa réponse, Jean-Paul II⁠[2], Jean-Paul II commença par rappeler son discours au Parlement européen du 11-10-1988 et la distinction évangélique entre Dieu et César : « Cette distinction essentielle entre la sphère de l’aménagement du cadre extérieur de la cité terrestre et celle de l’autonomie des personnes s’éclaire à partir de la nature respective de la communauté politique à laquelle appartiennent nécessairement tous les citoyens et de la communauté religieuse à laquelle adhèrent librement les croyants ». Il en vint alors à la notion de laïcité. Celle-ci, déclara le Saint Père, « est à entendre à la fois comme une autonomie de la société civile et des confessions religieuses, dans les domaines qui leur sont propres, mais en même temps comme une reconnaissance du fait religieux, de l’institution ecclésiale et de l’expérience chrétienne parmi les composantes de la nation, et non seulement comme des éléments de la vie privée. Le principe même de laïcité n’exclut ni la libre adhésion de foi des personnes, ni l’acceptation de la dimension religieuse dans le patrimoine national. L’autonomie légitime des réalités terrestres ne permet pas non plus que l’on fasse abstraction des principes qui fondent la vie personnelle et la vie sociale. La laïcité laisse donc à chaque institution, dans la sphère qui est la sienne, la place qui lui revient, dans un dialogue loyal en vue d’une collaboration fructueuse pour le service de tous les hommes. Une séparation bien comprise entre l’Église et l’État conduit au respect de la vie religieuse et de ses symboles les plus profonds, et à une juste considération de la démarche et de la pensée religieuses. Non seulement c’est une garantie de la libertés des personnes et des groupes humains, mais c’est aussi un appel pour que ce qui est propre à l’Église puisse demeurer un élément de réflexion pour tous et être une contribution positive aux débats de société, en vue de la promotion et du respect des personnes, ainsi que de la considération du bien commun et des droits de l’homme, qui sont des éléments objectifs que l’on ne peut jamais perdre de vue dans les décisions sociales ».


1. In DC n° 2193, 6-12-1998, pp. 1007-1009.
2. Discours au nouvel ambassadeur de France, DC n° 2193, 6-12-1998, pp. 1009-1012.