iv. Mais de quelle famille parlons-nous ?
« …La famille, écrit Jean-Paul II, en tant que cellule de base et structure essentielle de la société, doit être privilégiée dans les décisions politiques et économiques »[1]. Elio Di Rupo, qui fut ministre et président du parti socialiste en Belgique, affirme la même chose, à première vue, en disant la « volonté de la gauche de replacer la famille et la vie familiale au centre des préoccupations sociales et économiques. »[2]
Mais, le mot « famille » a-t-il le même sens dans ces deux citations si proches et la société tire-t-elle toutes les conséquences logiques de ces déclarations ?
Sous le mot « famille » se cachent des réalités fort diverses. A la limite, la famille pourrait se définir comme un groupe constitué au moins d’un adulte et d’un enfant (ne parle-t-on pas de « famille monoparentale » ?). Dans le langage courant contemporain, le mode de constitution du groupe importe peu. La famille naît d’un mariage, d’une cohabitation, d’une rencontre fortuite, d’une insémination, d’une fécondation in vitro, elle survit à une rupture, s’élargit à la faveur d’une nouvelle association officielle ou non et elle voudrait se construire aussi bien sur l’hétérosexualité que sur l’homosexualité.[3]
Pour consacrer cette réalité et avec l’intention parfois louable de rencontrer des problèmes sociaux réels suscités par les nouvelles formes familiales, dans la plupart des pays d’Europe, sont apparus des lois ou des projets de lois visant à légaliser la cohabitation entre personnes faisant une déclaration de vie commune ou à reconnaître publiquement des unions de fait (Pacte d’union civile en Italie, Pacte civil de solidarité en France, Contrat de vie commune ou Cohabitation légale en Belgique). Ces mesures qui veulent offrir un cadre juridique à des personnes qui ne veulent ou ne peuvent se marier, tendent à réduire le mariage à une forme de cohabitation parmi d’autres et ouvrent la porte à la reconnaissance légale des couples homosexuels.
Il faut donc commencer par préciser si nous parlons de la « famille » au sens flou (famille « multimodale » ou « à géométrie variable »[4] ), ou si nous nous en tenons au sens classique du droit moderne : « ensemble des personnes liées entre elles par le mariage »[5].
Je précise donc, avec Lecaillon, qu’une famille, pour remplir au mieux les fonctions évoquées plus haut, doit être « constituée de l’union stable et durable d’un homme et d’une femme ayant le projet d’avoir et d’éduquer des enfants »[6] en ajoutant toutefois un élément capital : cette union pour être stable et durable doit reposer sur un engagement public.