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g. Conclusion

Avec B. Faure, on peut déduire de tout ce qui précède que « la violence bouddhique a des origines complexes – à la fois théologiques, sociologiques, politiques, ethniques et culturelles. (…)  Le bouddhisme –singulier ou pluriel- est une entité élusive, qui n’existe peut-être pas en dehors des représentations qu’on s’en fait. Il existe des doctrines bouddhiques –parfois contradictoires-, des rites et des institutions bouddhiques, des collectivités et des individus qui se disent bouddhistes – et qui donc le sont, à des degrés divers. Aucun de ces éléments ne saurait à lui seul prétendre représenter le bouddhisme. L’existence de bouddhistes violents ne signifie pas que le bouddhisme soit violent, ni celle des bouddhistes pacifiques que le bouddhisme soit non-violent. (…) Le bouddhisme, tel du moins qu’on se le représente, est avant tout une sotériologie, une doctrine de salut, et selon les cas, la violence comme la non-violence peuvent constituer des « moyens » d’avancer sur cette voie – même si, dans l’ensemble, la première constitue plutôt un obstacle. (…) Le bouddhisme n’est pas aussi dénué de violence qu’il le prétend. Son idéal de paix et de tolérance, tel qu’il s’exprime dans certaines sources canoniques, est battu en brèche par d’autres sources tout aussi canoniques, selon lesquelles la violence et la guerre sont permises lorsque le Dharma bouddhique est menacé par des infidèles. En outre, l’imagerie bouddhique révèle une violence plus profonde, peut-être essentielle. (…) …même dans les cas avérés de violence, le bouddhisme est surtout coupable de n’avoir pas su garder suffisamment ses distances vis-à-vis des enjeux politiques ou des idéologies nationalistes propres au milieu dont il était issu. »⁠[1]

Cette ambigüité tient aussi à certains points de doctrine : l’absence de « moi » qui justifie le sacrifice, le relativisme éthique qui découle de l’importance donnée à l’intention, la théorie des deux vérités qui juxtapose le prêtre et le guerrier et celle de la compassion. Enfin, suprême excuse, le Buddha a prévu qu’après lui, le bouddhisme entrerait en déclin et que les violences seraient un « signe des temps », la preuve que la fin est proche.

Il n’est pas inutile de terminer par une note optimiste. Le 29 mai 2009, Benoît XVI recevait le nouvel ambassadeur de Mongolie⁠[2], un pays qui compte trois millions d’habitants, en majorité bouddhistes tibétains. Cette ancienne république communiste s’est dotée en 1990 d’une constitution qui garantit la liberté religieuse. De ce fait, en 1992, des relations diplomatiques ont été établies avec le Saint-Siège et les premiers missionnaires⁠[3] sont arrivés sur une terre où pratiquement personne n’avait entendu parler de Jésus.⁠[4] Le Saint Père a salué « l’ouverture du peuple mongol qui conserve précieusement les traditions religieuses transmises de générations en générations, et qui fait preuve d’un profond respect pour les traditions qui ne sont pas les siennes ». Il a ensuite exprimé sa reconnaissance au gouvernement et aux autorités civiles qui ont tout fait « pour que cela puisse se réaliser ».⁠[5] Deux éléments importants apparaissent donc dans cette allocution : d’une part, une culture ouverte et d’autre part, comme garant suprême de cette ouverture un État qui tient au droit fondamental de la liberté religieuse et qui ne se confond pas avec le pouvoir religieux fût-il majoritaire.⁠[6]


1. FAURE B., op. cit., pp. 150-155.
2. Danzannorov Boldbaatar.
3. Un Belge et deux Philippins.
4. En 2009, la Mongolie comptait plusieurs centaines de catholiques et un évêque. Une centaine de personnes sont baptisées chaque année.
5. Cf. Zenit.org, 29-5-2009.
6. La notion de liberté religieuse est loin d’être acquise en pays officiellement bouddhiste. Au Laos, par exemple, les autorités surveillent de très près et souvent entravent les activités religieuses des catholiques qui n’étaient pourtant que 43.000 en 2011, sur une population de six millions d’habitants. Les chrétiens ne sont pas les seuls à être souvent discriminés voire persécutés: Depuis plusieurs années, les musulmans sont la cible des bouddhistes en Birmanie et au Sri Lanka à tel point que le Dalaï Lama a dû, en 2014, demander aux bouddhistes d’arrêter leurs violences. (Cf. La-Croix.com, 7 juillet 2014). Encore aujourd’hui, (2020), les rohinghyas, minorité musulmane, ont fui au Bangadesh la répression exercée contre eux par le gouvernement du Myanmar (Birmanie). (Cf. amnesty.fr).