Au nom d’un des fondements de l’enseignement social chrétien, on pourrait dénoncer la collusion entre le religieux et le temporel dans la pratique des banques islamiques puisque les différents types de contrats doivent être conformes à la charia. Mais si nous donnons comme norme à la banque de respecter non la charia, non une règle éthico-religieuse mais le bien commun ou des principes moraux naturels et universels, l’objection de la confusion des pouvoirs ne vaut plus. Rappelons-nous l’éloge que Pie XII faisait des banques populaires.
Or il existe aujourd’hui des institutions bancaires ou financières qui ont choisi de fonctionner en respectant des valeurs et des principes dont certains paraîtront familiers aux chrétiens. Ces institutions présentent aux épargnants et aux investisseurs des produits moins rentables financièrement que dans les institutions classiques mais plus intéressants, plus « rentables » sur les plans social, culturel, environnemental.
Ainsi, la banque Triodos[1] finance des « projets jugés non-rentables par les banques traditionnelles. Sont ainsi financés les projets d’insertion de personnes défavorisées sur le marché du travail ou encore les formules novatrices du logement - pour l’aspect social -, les énergies renouvelables et l’agriculture biologique bénéficient également de l’attention de Triodos - pour l’aspect environnemental - tout comme les institutions de formation artistique ou les centres d’enseignement alternatif (pour le côté culturel). » d’où proviennent les crédits ? « De groupes de personnes se portant garantes sur de petites parts de la somme totale du crédit attribué ».[2] La banque fonctionne donc sur les principes de solidarité, de responsabilité et de transparence car les clients doivent être régulièrement et correctement informés de l’utilisation de leur argent.
La Nef, société coopérative de finances solidaires[3], fonctionne plus ou moins selon les mêmes principes et, dans la présentation de sa philosophie, précise qu’elle « s’inspire d’une vision résolument humaniste : elle place l’attention pour la personne humaine au centre des systèmes économiques et financiers et se situe dans une perspective de transformation sociale vers une économie fraternelle ». Elle « veille à écarter de son champ d’action tout projet qui porterait atteinte à la dignité humaine ou nuirait gravement à la qualité et à la durabilité de l’environnement. »
Cette institution, comme d’autres du même genre[4], « s’inscrit au cœur d’un réseau européen de banques éthiques rassemblées au sein de la Fédération européenne des banques éthiques et alternatives. Toutes s’inspirent d’un modèle de développement humain et social dans lequel la production et la distribution de richesses sont fondées sur des valeurs de solidarité et de responsabilité vis-à-vis de la société, en vue de la réalisation du bien commun. »[5]
Quant au prêt sans intérêts, il n’est pas totalement absent de l’offre de la banque éthique. Ainsi, en France, l’État a mis en place le PTZ (prêt taux zéro) qui est distribué par les banques sous certaines conditions. Même un particulier peut y accéder pour l’achat d’une résidence principale. Le prêt est, bien sûr, « soumis à des conditions de ressources qui dépendent de la zone géographique où vous habitez et de la taille de votre ménage ».[6]
En Belgique, la loi autorise un employeur à prêter sans intérêt ou avec un intérêt réduit, à tout membre de son personnel ou à l’un de ses dirigeants.[7] Des associations diverses proposent aussi ce genre de prêt. Ce n’est en fait et en définitive que l’extension d’une pratique familiale, basée sur la confiance et la solidarité[8].
Notons, pour être complet que depuis quelques années, toutes les grandes banques proposent des produits éthiques[9]