Il est un autre problème que Jean-Paul II, en 1991, aborde : celui de
l’État-providence. Problème aussi très délicat car, d’une part, depuis
Pie XII, dénonce, dès la fin de la guerre, la tendance à accorder à
l’État de plus en plus de responsabilités, au risque d’en faire un
« léviathan » mais, en même temps, le développement de la sécurité
sociale, qui n’est certainement pas un mal en soi, en a fait souvent un
« doux léviathan », dirais-je, confortable et séduisant.
Il n’est pas inutile de décrire brièvement la naissance de cet
État-providence ni d’évoquer les raisons de sa mise en question à
l’heure actuelle.
A l’origine, est le droit social, « né de ce qu’on appelle la question
sociale, l’exploitation scandaleuse d’une main-d’œuvre bridée, il s’est
façonné à partir des revendications du mouvement ouvrier, des inégalités
de traitement entre le patronat et le prolétariat : inégalité dans la
représentation dans les juridictions, pénalités différenciées entre
patron et ouvrier en cas de grève ou de lock out, foi absolue en la
parole du patron qui ne devait guère prouver. Il fallut des émeutes, des
grèves violentes pour que, à la fin du XIXe siècle, les politiques se
mettent à bouger et à admettre que le recours au droit civil ne pouvait
régler ces injustices. Il fallait un autre droit, davantage collé aux
réalités sociales et économiques. Progressivement, dans un rapport de
forces toujours tendu, s’opéra l’accouchement, douloureux, de ce droit
différent. Il traduisait des valeurs nouvelles ainsi qu’une
transformation du rôle de l’État : plus interventionniste, plus
dispensateur d’égalité, plus soucieux d’une justice distributive. Ce
nouveau paradigme conduira à la mise en place de l’État Providence,
lequel aujourd’hui subit les assauts de la mondialisation
libérale. »
Cette dernière réflexion doit être complétée car, s’il est vrai que la
« mondialisation libérale » s’accompagne la plupart du temps d’une mise en
question de l’État-providence, force est de constater que le système que
recouvre l’étiquette État-providence suscite des difficultés telles que
les sociaux-démocrates eux-mêmes ont entrepris ou proposé des réformes.:
« Il est frappant en effet de constater que le capitalisme a surmonté la
crise sociale en se transformant. Lois sociales, reconnaissance des
syndicats, mises en place de structure de discussion, sécurité sociale,
redistribution des revenus, accroissement du rôle économique de l’État,
(…) développement de l’État-providence, tout cela s’est fait en
élargissant le domaine de la justice distributive, mise en question
aujourd’hui par les erreurs de politique économique qui ont entraîné ou
favorisé la crise.
Sans même décrire ici les conséquences de l’État-providence sur les
comportements et les attitudes des individus (perte du sens de l’épargne
individuelle, recul du sens des responsabilités, mentalité d’assistés
sociaux, conflits corporatistes), il faut bien reconnaître fondées les
critiques que les analystes économiques portent sur les dysfonctions et
le fonctionnement bloqué du régime actuel : on a atteint une limite qui
semble insurmontable. »
En effet, plusieurs facteurs menacent aujourd’hui les États sociaux
d’asphyxie dans la mesure où le nombre d’allocataires
(chômeurs indemnisés, minimexés, invalides, retraités) a
considérablement augmenté alors que le taux d’emploi restait plus ou
moins stable ou ne se développait pas dans la même proportion. En
Belgique, par exemple, il y avait, en 1970, deux actifs pour un
allocataire ; 30 ans plus tard, on comptait un actif pour un
allocataire.
Comment en est-on arrivé là ?
Le vieillissement de la population réclame plus de moyens pour les
pensions et l’assurance maladie. L’irruption des femmes sur le marché du
travail rend le plein emploi beaucoup plus difficile à réaliser. Dans le
même temps, le marché du travail ne s’est pas toujours élargi mais il
s’est modifié : l’économie industrielle a, de plus en plus, fait place à
une économie de services et ce glissement a révélé « une inadéquation
entre les qualifications demandées et existantes ». Tous les moyens mis en œuvre pour faire face à
ces phénomènes : retraites anticipées, allocations de chômage,
interruptions de carrière, etc., ont un coût. Ajoutons encore les
restructurations, les délocalisations, les licenciements pour manque de
rentabilité, etc., qui gonflent le nombre d’allocataires et l’on
comprendra aisément dans quelle situation dramatiques se trouvent
certains états sociaux.
Est née alors, dans les dernières années du XXe siècle, l’idée d’un État
social actif qui devrait remplacer l’État social passif qu’est
l’État-providence classique.
Si ce nouveau concept a séduit des esprits libéraux, il n’est
certainement pas étranger à la social-démocratie. En Belgique, un des plus chauds partisans de cet État
social actif fut le socialiste Frank Vandenbroucke. En Angleterre, c’est
le travailliste Tony Blair qui remet en cause le droit social
traditionnel. On peut ajouter aussi le nom du socialiste allemand
Gehrard Schröder avec son plan de réforme appelé « Agenda
2010 ». C’‘est l’ensemble des pays européens qui
sont invités à repenser leur politique sociale.
qu’est-ce l’État social actif ?
L’État social actif se présente « comme une réponse rationnelle aux
défis socio-économiques auxquels les états sociaux sont de plus en plus
confrontés ». Cet État social actif « vise à une société de personnes
actives » tout en préservant « une protection sociale adéquate ».
En fait, « il ne s’agit plus seulement d’assurer des
revenus, mais aussi
d’augmenter les possibilités de participation sociale, de façon à
accroître le nombre des personnes actives dans la société ». A cette
fin, l’État doit mettre l’accent sur la prévention des risques et sur la
surveillance pour « supprimer dans les meilleurs délais la dépendance de
soins ». Il doit investir dans la formation et l’enseignement, agir de
manière ciblée, « sur mesure » pour revaloriser « ceux qui possèdent la
meilleure connaissance du terrain. » En fait, l’État social actif « ne
dirige pas mais il délègue » afin de « responsabiliser tous les
organismes de sécurité sociale » qui recevront « davantage d’autonomie
administrative pourvu qu’ils s’engagent vis-à-vis de l’autorité à
obtenir des résultats ».d’une manière générale, il faut tendre à plus de
participation active pour lutter contre la pauvreté et mieux répartir
les revenus. Comme la participation au marché du travail ne garantit pas
automatiquement moins de pauvreté, il
faut penser à une participation sociale au sens large plutôt qu’à la
participation au marché du travail formel.
La participation est liée à une autre notion : la notion de
responsabilité. Notion souvent mal perçue, nous le verrons parce qu’elle
semble véhiculer une présomption de faute chez les allocataires. Or,
l’accent mis sur la responsabilité personnelle est surtout l’effet « des
nouveaux risques (manque de qualifications, isolement, …) et (du)
lien créé à tort ou à raison entre ces risques et le comportement
personnel. » Les personnes ne sont évidemment pas
responsables d’un handicap de naissance, qu’il soit physique ou
intellectuel, d’une catastrophe naturelle. Elles ne sont pas
responsables non plus des dons ou talents innés ou acquis dans la petite
enfance « mais bien de l’usage qu’elles font de ces talents ».
La responsabilisation personnelle garantit « une véritable égalité des
chances ». de tous les acteurs. Il n’y a donc pas d’égalité sans
responsabilité, responsabilité de tous, chômeurs, malades, personnes
âgées, employeurs, syndicats, etc.. Il n’y a pas d’égalité sans
responsabilité ni, bien sûr, sans solidarité : il faut « oser envisager « non seulement la rhétorique
commode au sujet des responsabilités morales des pauvres et des faibles,
mais aussi une rhétorique plus malaisée concernant les obligations
sociales des riches et des puissants ». » L’État social actif « implique que les acteurs sociaux assument
leurs responsabilités. Il suppose tout autant que les pouvoirs publics
reconnaissent ces responsabilités et cette compétence de
terrain. »
Bien conscient que certaines personnes sont tout à fait responsables de
la situation dramatique dans laquelle elles se retrouvent, l’auteur
tient à ajouter à sa description de l’État social actif, la notion de
« compassion » qui, peut-être « n’a pas sa place dans le domaine
rigoureux de la justice mais qui le complète ».
Reste la difficile mise en œuvre de ces principes. Mais, quelles que
soient les formules pratiques retenues, la philosophie développée révèle
une plus grande attention à la personne et plus de subsidiarité liée à
la solidarité puisque tous les acteurs sont mobilisés et qu’au niveau
des pouvoirs publics, l’État n’est plus le seul grand dispensateur de la
protection et de l’aide puisque la politique sociale relève aussi des
villes et des régions.
L’État social actif est loin de faire l’unanimité. Dans ses différentes
variantes sous d’autres appellations, il est critiqué dans les milieux
ultra-libéraux évidemment mais aussi au
sein d’organisations de travailleurs. Ainsi le Mouvement ouvrier
chrétien et la revue Démocratie se montrent-ils plus que réticents
défendant l’idée que les deux piliers de la vraie politique sociale sont
d’une part « la réduction des inégalité de revenus et une
extension/amélioration des services publics » : « C’est moins les
chômeurs qu’il faut activer que la capacité régulatrice de l’État.
Rompre avec le néolibéralisme suppose de réinventer une politique
macroéconomique de plein emploi adaptée au contexte
actuel. » Franck
Vandenbroucke, quant à lui, est accusé de reproduire « les poncifs les
plus archaïques du discours libéral ».
Une observatrice universitaire porte un jugement plus nuancé. Après
avoir rappelé que, jusqu’au choc pétrolier de 1980, « la question
centrale de l’État social était de définir les risques à couvrir et de
chercher ensuite les moyens de les financer afin d’assurer les citoyens
contre leur survenance », elle remarque que, « par la suite, la démarche
s’est petit à petit inversée : des enveloppes budgétaires fermées ont été
préalablement fixées et l’on a examiné ensuite contre quels aléas cela
permettrait encore de protéger la population. » Dès lors, on a mis « de
plus en plus l’accent sur la responsabilité individuelle des
travailleurs, qui sont priés de gérer au mieux - c’est-à-dire au moins
cher - leur carrière. » « Le langage en arrière-plan témoigne du
changement de mentalité. On ne parle plus de solidarité mais de
responsabilité », note-t-elle, simplifiant un peu le discours des «
partis de gauche ». Elle relève tout de même que « l’État social actif
prétend préserver certains acquis. Reste que les conditions d’ensemble
se détériorent. On voit ainsi, continue-t-elle, se multiplier les
emplois aux statuts précaires comme pour les contrats ALE qui
ne bénéficient pas des garanties individuelles et collectives du droit
du travail. De même, on voit se généraliser des pratiques contraignantes
comme quand les subventions des CPAS sont calculées en fonction du
nombre de personnes mises au travail. (…) Les gens sont désormais
obligés de se former, même si c’est dans une voie qui ne leur plaît pas
du tout. » En conclusion : « Parler de crise de l’État providence n’est
donc pas exagéré. »
Que penser de tout cela ? L’Église, sous Jean-Paul II, a-t-elle un
discours sur ces questions, qui pourrait nous éclairer ?
Nous savons déjà que Pie XII a eu l’occasion, au lendemain de la guerre,
lors de l’expansion des systèmes de sécurité sociale, de prendre
position. Distinguant une sécurité sociale qui fonctionnerait « grâce« à
la société et une autre qui se construirait « dans » et « avec » la société,
Pie XII a voulu surtout mettre en garde contre une sécurité qui serait
le monopole de l’État alors que la vraie sécurité doit naître d’abord
d’un salaire suffisant, de la possibilité d’accéder à l’épargne et à la
propriété, être assurée ensuite par les communautés et les organisations
professionnelles, l’État intervenant pour suppléer aux carences de tous
les échelons précédents.
Jean-Paul II va décrire comment s’est constitué, à partir du souci de
sécurité, l’État-providence, ses intentions, ses faiblesses, ses erreurs
et ses limites : « On a assisté, récemment, à un important élargissement
du cadre de ces interventions, ce qui a amené à constituer, en quelque
sorte, un État de type nouveau, l’« État du bien-être ». Ces
développements ont eu lieu dans certains États pour mieux répondre à
beaucoup de besoins, en remédiant à des formes de pauvreté et de
privation indignes de la personne humaine. Cependant, au cours de ces
dernières années en particulier, des excès ou des abus assez nombreux
ont provoqué des critiques sévères de l’État du bien-être, que l’on a
appelé l’« État de l’assistance ». Les dysfonctionnements et les défauts
des soutiens publics proviennent d’une conception inappropriée des
devoirs spécifiques de l’État. Dans ce cadre, il convient de respecter
également le principe de subsidiarité : une société d’ordre supérieur ne
doit pas intervenir dans la vie interne d’une société d’un ordre
inférieur, en lui enlevant ses compétences, mais elle doit plutôt la
soutenir en cas de nécessité et l’aider à coordonner son action avec
celle des autres éléments qui composent la société, en vue du bien
commun.
En intervenant directement et en privant la société de ses
responsabilités, l’État de l’assistance provoque la déperdition des
forces humaines, l’hypertrophie des appareils publics, animés par une
logique bureaucratique plus que par la préoccupation d’être au service
des usagers, avec une croissance énorme des dépenses. En effet, il
semble que les besoins soient mieux connus par ceux qui en sont plus
proches ou qui savent s’en rapprocher, et que ceux-ci soient plus à même
d’y répondre. On ajoutera que souvent certains types de besoins
appellent une réponse qui ne soit pas seulement d’ordre matériel mais
qui sache percevoir la requête humaine plus profonde. Que l’on pense
aussi aux conditions que connaissent les réfugiés, les immigrés, les
personnes âgées ou malades, et aux diverses conditions qui requièrent
une assistance comme dans le cas des toxicomanes, toutes personnes qui
ne peuvent être efficacement aidées que par ceux qui leur apportent non
seulement les soins nécessaires, mais aussi un soutien sincèrement
fraternel. »
Il est clair, à travers ce texte, qu’on ne peut charger, sans dommages,
l’État de toute la sécurité sociale. En lui accordant le monopole de la
solidarité, on gonfle et paralyse finalement ses fonctions
essentielles ; on dépouille les personnes et les
corps intermédiaires des leurs et l’on perd de vue qu’il y a des
pauvretés qui ne peuvent se satisfaire des aides matérielles.
En pâtissent le principe de subsidiarité mais aussi « le principe
d’économicité » qui veut que l’État, comme tous
les corps sociaux, emploie les biens de manière rationnelle, à bon
escient et sans gaspillage.
L’État-providence ne s’épanouit qu’en appauvrissant les corps
intermédiaires alors qu’ils sont les vrais organes dynamiques et
protecteurs d’une société : « Le système économique et social doit être
caractérisé par la présence simultanée de l’action publique et de
l’action privée, y compris l’action privée sans finalités lucratives. Se
configure ainsi une pluralité de centres décisionnels et de logiques
d’action. Il existe certaines catégories de biens, collectifs et d’usage
commun, dont l’utilisation ne peut dépendre des mécanismes du marché et
ne relève pas non plus de la compétence exclusive de l’État. Le devoir
de l’État en rapport à ces biens, est plutôt de mettre en valeur toutes
les initiatives sociales et économiques qui ont des effets publics et
sont promues par les structures intermédiaires. La société civile,
organisée à travers ses corps intermédiaires, est capable de contribuer
à la poursuite du bien commun en se situant dans un rapport de
collaboration et de complémentarité efficace vis-à-vis de l’État et du
marché, favorisant ainsi le développement d’une démocratie économique
opportune. Dans un tel contexte, l’intervention de l’État doit être
caractérisée par l’exercice d’une véritable solidarité qui, en tant que
telle, ne doit jamais être séparée de la subsidiarité. »
Dans des sociétés moins développées existent « des coutumes et des
traditions communautaires, garantissant à chaque membre les biens les
plus nécessaires. (…) Il faut éviter de considérer certaines
coutumes comme tout à fait immuables, si elles ne répondent plus aux
nouvelles exigences de ce temps ; mais, à l’inverse, il ne faut pas
attenter imprudemment à des coutumes honnêtes qui, sous réserve d’une
saine modernisation, peuvent encore rendre de grands services ».
Dans les sociétés développées : « un réseau d’institutions sociales,
d’assurance et de sécurité, peut réaliser en partie la destination
commune des biens. Il importe de poursuivre le développement des
services familiaux et sociaux, principalement de ceux qui contribuent à
la culture et à l’éducation. Mais dans l’aménagement de toutes ces
institutions, il faut veiller à ce que le citoyen ne soit pas conduit à
adopter vis-à-vis de la société une attitude de passivité,
d’irresponsabilité ou de refus de service. »
La famille doit conserver toutes ses capacités protectrices : « La
solidité du noyau familial est une ressource déterminante pour la
qualité de la vie sociale en commun… communauté d’amour et de
solidarité… »
L’accès à la terre et à la propriété privée ou communautaire restent,
malgré les nouvelles formes de protection, des moyens de se garantir
contre les aléas de l’existence : « Si, dans le processus économique et
social, des formes de propriété inconnues par le passé acquièrent une
importance notoire, il ne faut pas oublier pour autant les formes
traditionnelles de propriété. La propriété individuelle n’est pas la
seule forme légitime de possession. L’ancienne forme de propriété
communautaire revêt également une importance particulière ; bien que
présente aussi dans les pays économiquement avancés, elle caractérise
particulièrement la structure sociale de nombreux peuples indigènes.
C’est une forme de propriété qui a une incidence si profonde sur la vie
économique, culturelle et politique de ces peuples qu’elle constitue un
élément fondamental de leur survie et de leur bien-être. » Mais ce type
de propriété est amené à évoluer.
« La distribution équitable de la terre demeure toujours cruciale, en
particulier dans les pays en voie de développement ou qui sont sortis
des systèmes collectivistes ou de colonisation. Dans les zones rurales,
la possibilité d’accéder à la terre grâce aux opportunités offertes par
les marchés du travail et du crédit est une condition nécessaire pour
l’accès aux autres biens et services ; non seulement elle constitue une
voie efficace pour la sauvegarde de l’environnement, mais cette
possibilité représente un système de sécurité sociale réalisable aussi
dans les pays disposant d’une structure administrative
faible. » En conclusion, « Une série d’avantages
objectifs dérive de la propriété pour le sujet propriétaire, qu’il
s’agisse d’un individu ou d’une communauté : conditions de vie meilleure,
sécurité pour l’avenir, plus vastes opportunités de
choix. »
Quant aux systèmes de sécurité sociale mis en place par
l’État-providence, il faut, vu les circonstances et leur aboutissement,
les renouveler : « En poursuivant « de nouvelles formes de
solidarité », les associations de travailleurs doivent s’orienter vers
l’assomption de plus grandes responsabilités, non seulement dans le
cadre des mécanismes traditionnels de la redistribution, mais aussi à
l’égard de la production de la richesse et de la création de conditions
sociales, politiques et culturelles qui permettent à tous ceux qui
peuvent et désirent travailler d’exercer leur droit au travail, dans le
plein respect de leur dignité de travailleurs. Le dépassement graduel du
modèle d’organisation basé sur le travail salarié dans la grande
entreprise rend opportune en outre la mise à jour des normes et des
systèmes de sécurité sociale qui ont servi à protéger les travailleurs
jusqu’à présent , tout en préservant leurs droits
fondamentaux. »
Les systèmes actuels de sécurité sociale sont inadaptés : « la transition
actuelle marque le passage du travail salarié à durée indéterminée,
conçu comme une place fixe, à un parcours de travail caractérisé par une
pluralité d’activités ; d’un monde du travail compact, défini et reconnu,
à un univers de travaux diversifié, fluide, riche de promesses, mais
aussi chargé d’interrogations préoccupantes, spécialement face à
l’incertitude croissante quant aux perspectives d’emplois, aux
phénomènes persistants du chômage structurel, à l’inadaptation des
systèmes actuels de sécurité sociale. Les exigences de la concurrence,
de l’innovation technologique et de la complexité des flux financiers
doivent être harmonisés avec la défense du travailleur et de ses
droits. »
Sécurité sociale, certes, assistance, certes, par solidarité mais dans
le respect de la subsidiarité, sans céder à ce que le Compendium de la
doctrine sociale de l’Église appelle « assistantialisme » et à l’étatisme.