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b. Un temps d’arrêt avec Grégoire XVI et Pie IX

Les vieilles théories connaîtront une dernière proclamation sous la plume de Grégoire XVI tout d’abord, qui, pourrait-on dire, résume de manière simpliste la position de ses prédécesseurs. En effet, il condamne les libertés de conscience, d’opinion et de presse puis engage les évêques « à rappeler aux peuples la doctrine de l’apôtre sur l’origine du pouvoir, et l’exemple des premiers chrétiens acceptant sans se révolter les ordres des empereurs quand ils ne touchaient qu’au temporel ». Ensuite il s’en prend à la séparation de l’Église et de l’État en défendant « l’union des deux pouvoirs qui s’est toujours montrée utile à la société civile comme à l’ecclésiastique »[1]. C’est sans doute la peur des révolutions et du laïcisme montant qui inspira à Grégoire XVI de telles formules qui paraissent très en recul par rapport à tout ce que la théologie a lentement établi au cours des siècles.

d’une certaine manière, Pie IX a, du moins dans l’encyclique Quanta cura suivie du Syllabus (Catalogue d’erreurs qui ont été condamnées dans différentes déclarations de Pie IX)⁠[2], mis le doigt sur ce que l’Église ne peut jamais admettre, quel que soit le régime en cause : la rupture entre l’opinion et la vérité, entre la volonté du peuple et le droit divin et humain, entre l’Église et l’État. Mais il condamne la proposition selon laquelle « L’abrogation du pouvoir civil dont jouit le Siège apostolique contribuerait au plus haut point à la liberté et au bonheur de l’Église »[3]. Il est évident que, dans le contexte historique, le Pape prétendait par l_ défendre l’intégrité de ses États pontificaux qui étaient la proie de nombreuses convoitises.

d’autre part, on sait aujourd’hui que, dans les années 1870, Pie IX ne craindra pas de se compromettre en considérant le comte de Chambord comme l’héritier légitime de la monarchie et comme le vrai représentant de la France⁠[4].

Il ne faut pas évidemment juger l’attitude de Pie IX sans tenir compte des circonstances dramatiques de son pontificat⁠[5]. Les épreuves que ses prédécesseurs et lui-même ont subies, les menaces que la civilisation « moderne » fait peser sur la foi expliquent les choix de ce souverain pontife canonisé le 3 septembre 2000⁠[6] en même temps que Jean XXIII qui avait beaucoup de vénération pour lui.


1. Mirari vos, 15 août 1832.
2. 8 décembre 1864.
3. Proposition 76.
4. MARTIN Mgr Jacques, Rétablir la monarchie ? Pie IX et le Comte de Chambord, OR, 14 juin 1988, pp. 10-11. L’auteur évoque aussi les réactions de Monseigneur de Ségur qui avait publié un opuscule enthousiaste intitulé « Vive le Roi ! ». Au grand étonnement du prélat, Pie IX le félicita (31-7-1871) :  »J’avoue, écrit Monseigneur de Ségur, que je ne m’attendais pas à voir le Saint-Père répondre à mon hommage. Rome est si prudente, les circonstances actuelles sont si difficiles, le sujet était si vif et si compromettant que, tout en étant assuré des sentiments de notre bon Saint-Père, je ne pensais pas qu’il osât les manifester officiellement ».
5. Cf. CHRISTOPHE Paul et MINNERATH Roland, Le Syllabus de Pie IX, Cerf, 2000.
6. A cette occasion, Jean-Paul II apporta une précision fort utile d’une manière générale : « La sainteté se vit dans l’histoire et aucun saint n’est soustrait aux limites et aux conditionnements qui sont le propre de notre humanité. Quand elle béatifie l’un de ses enfants, l’Église ne célèbre pas des choix historiques particuliers qu’il a accomplis, mais plutôt elle le propose à l’imitation et à la vénération à cause de ses vertus, à la louange de la grâce divine qui resplendit en celles-ci » (Homélie lors de la béatification de Pie IX, de Jean XXIII, de Mgr Tommaso Reggio, du P. Chaminade et de Dom Marmion, 3-9-2000, in D.C., 1-10-2000, p. 801).