Quand nous pensons à l’homme, deux tendances apparemment contradictoires apparaissent. d’une part il est poussé par un besoin de liberté, une aspiration à l’autonomie qui est le signe le plus sûr de sa transcendance par rapport au reste de la création. Et il se fait qu’il est capable de s’autodéterminer, de choisir entre différents biens et de poursuivre celui qu’il a élu. Mais d’autre part, il a besoin des autres non seulement parce qu’il est incapable de pourvoir seul à tous ses besoins mais aussi parce que les autres lui permettent de grandir. Le petit enfant ne peut développer ses potentialités humaines sans l’assistance de l’autre. Sans l’autre humain, il ne peut acquérir le langage ni développer sa pensée. Quel que soit le patrimoine génétique, quels que soient les dons, ses capacités latentes ne peuvent se réaliser facilement sans un environnement favorable[1]. Il en va de même pour les groupes humains. Une famille peut-elle subvenir seule à tous les besoins de ses membres ? A-t-elle toutes les compétences ? A un niveau très élémentaire, un petit groupe d’individus peut survivre un certain temps en autarcie. Mais, la croissance intellectuelle et, à long terme, la survie ne peuvent être assurées. Un groupe restreint et isolé résistera-t-il longtemps aux maladies, aux catastrophes naturelles, à la consanguinité ? Pourra-t-il progresser dans les différents aspects de la créativité humaine ? Plus l’homme croît ou veut croître, plus il a besoin d’associations et institutions diverses « en vue d’atteindre des objectifs qui excèdent les capacités individuelles »[2].
Le développement de l’homme et des groupes exige donc un certain nombre de conditions très larges si l’on veut donner à chacun le maximum de possibilités pour grandir. Cet « ensemble de conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres d’atteindre leur perfection, d’une façon plus totale et plus aisée »[3] constitue le bien commun[4].